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BANA CONGO
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23 avril 2008

Congolité : non à l’hypocrisie !

Congolité : non à l’hypocrisie !

José Makila, actuel gouverneur de la province de l’Equateur, alors député national, avait failli faire flamber le Palais du Peuple, en février 2007, avec sa motion dénonçant la présence, au sein des deux chambres du Parlement, des institutions politiques et des entreprises publiques, de Congolais douteux à double voire triple nationalité. Pour le député du MLC, tout député ou sénateur reconnu « étranger » devait être invalidé. La liste de faux Congolais, déposée par l’intéressé sur la table du bureau de l’Assemblée Nationale, avait été frappée du sceau de « secret d’Etat », au motif que sa publication risquait de susciter des sentiments de rejet des incriminés au sein de notre société. Le débat fut tellement passionné que pour couper la poire en deux, la plénière de l’Assemblée Nationale dut accorder un moratoire de six mois aux citoyens détenteurs de deux ou trois nationalités. En principe, au plus tard en août 2007, le Parlement, pour ne citer que cette institution, aurait dû être débarrassé de tous les « expatriés » qui y siégeaient.

Un moratoire sans lendemain

Plus de huit mois après le délai-butoir, le moratoire sur la « nationalité » n’est toujours pas discuté au niveau de l’Assemblée Nationale. Certains députés, très préoccupés par la question, ont tenté, avec peine, de le faire insérer dans l’ordre du jour de la session en cours sans totalement y parvenir. La matière, semble-t-il, pourrait éventuellement faire l’objet des discussions mais sous un angle qui devait trancher avec la controverse autour de la double ou la triple nationalité. Entre-temps, tous les « étrangers » épinglés en son temps par José Makila continuent de jouir des dividendes financiers, logistiques et politiques liés à leur statut.

Révision constitutionnelle : la fin de l’hypocrisie

Pour d’aucuns, les Congolais se complaisent dans une vilaine hypocrisie qui consiste à s’accrocher, sur papier, au caractère exclusif de la nationalité congolaise alors que sur le terrain, la double ou triple nationalité est un secret de polichinelle. En effet, des millions de compatriotes de la diaspora comme ceux vivant au pays, en dépit des menaces de toutes sortes, n’entendent pas du tout renoncer aux « précieuses » nationalités étrangères acquises au terme des parcours de combattants. Les citoyennes et citoyens congolo-français, congolo-belges, congolo-américains, congolo-sud-africains, congolo-italiens, congolo-canadiens, congolo-portugais, congolo-angolais, congolo-congolais/Brazza, congolo-chinois, congolo-rwandais, congolo-burundais, congolo-zambiens, congolo-sénégalais, congolo-érytrhéens… ne se comptent plus.
Et, c’est pour des motifs nobles, liés à leur carrière politique, militaire, administrative, scientifique, académique, footballistique, musicale ou aux relations d’affaires que des Congolaises et des Congolais mettent à profit l’opportunité de la double ou la triple nationalité pour s’intégrer dans leurs pays d’adoption. La double ou triple nationalité est un phénomène universel.
D’où, de l’avis de nombreux observateurs, le législateur congolais a largement tort de persister à enfermer nos compatriotes dans la « formule-prison » du genre « la nationalité congolaise est une et exclusive ». Pour mettre un terme à l’hypocrisie, il est grand temps d’envisager une révision constitutionnelle au sujet de la « congolité ». Car, près d’un siècle après l’indépendance, l’exclusivité de la nationalité congolaise n’a empêché ni les rébellions, ni les guerres tribales et ethniques, ni les pillages des richesses nationales, ni l’instabilité des institutions, ni le déficit de nationalisme, ni la montée de la pauvreté, ni la restriction des libertés de mouvement, d’opinion et d’expression.
Les faux Congolais sont autant nuisibles au pays que les Congolais authentiques. Y a-t-il encore des secrets d’Etat ou des secrets-défense dans une RDC que des armées et des services spéciaux étrangers ont traversé de part en part entre 1997 et 2003, détruisant toutes les archives nationales et brisant le tabou des bases et cartes militaires ? La nouvelle société congolaise devrait se reconstruire avec une mosaïque de nationalités, comme c’est le cas pour les USA, la France, la Belgique, la Grande-Bretagne, l’Afrique du Sud, le Canada, le Japon, la Chine… S’accrocher aujourd’hui à la « congolité » exclusive s’apparente à une hypocrisie de mauvais goût.

Jacques Kimpozo Mayala

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